Lithique : qui a rapport à la pierre, à la taille de la pierre, à l'art de la pierre et à son industrie -
Art lithique : le retour au granit et le réveil de l'Homme - instinct, bestialité et délicatesse
"Combien de temps avez vous mis pour faire ça ?" ...
46 ans !!!!
...et, pour développer, tout a commencé il y a 46 ans à Quimperlé dans le Finistère.
Fruit pas encore blet de quatre générations de carriers marbriers, j'ai opté, à l'époque ou on peut encore le faire, pour les voyages et les belles aventures afin de vivre du beau !
C'est donc baigné de beau et d'un tout différent, que la sculpture m'accompagne depuis vingt ans (...mince ,déjà !)
Je ne supporte pas les fils cachés de l'art et de la carte postale car faire deux fois la même chose est en soit une petite mort.
Je marche et vole sur un sujet jusqu'à satiété.
La bigoudène est la résonnance la plus raisonnable à notre belle féodalité moderne, leur coiffe, étendard sans gland, trône comme un chêne qui se moque bien du superflu.
Fondateur de l'art "préhysterique", et me réclamant seul membre actif, et même très actif, je me suis délecté de compressions, de classique et de mariages de matières et matériaux !
Un marteau et un burin : oui! Mais collez-leur un peu de délicatesse et ils vous le rendent bien !...
Mais créer? Peine perdue.
La vie est courte, la mémoire se fâne. Je ne suis qu'un artisan du fugitif, toutes ces statues sont vouées à l'éphémère, à la fuite du temps...
Philippe Chantriaux
J'ai été un temps scotché par Rodin et sa technique époustouflante.
Finalement je suis plus impressionné par Camille Claudel, sa petite main, son ouvrière par amour et par nécessité, sa confectionneuse d'œuvres d'art.
Si je devais actuellement me réfèrer à un courant artistique j'évoquerais - mais uniquement de loin - l'Art Brut.
Je me retrouve assez dans cette façon de se livrer à un art mais lavé de toute culture artistique, des savoirs imposés. Ca me semble être une grande forme de liberté que de déposer les contraintes et les normes.
Loin des démarches artistiques, esthétiques ou intellectuelles, je laisse agir les mains, l'impulsion, l'intuition et la nécessité.
« L’art ne vient pas coucher dans les lits qu’on a faits pour lui ; il se sauve aussitôt qu’on prononce son nom : ce qu’il aime c’est l’incognito. Ses meilleurs moments sont quand il oublie comment il s’appelle. »
— Jean Dubuffet. 1960
Au delà de l'art brut, la matière, bien sûr, m'intéresse; j'aime découvrir et faire découvrir les connexions entre les matières, les essences intimes des choses. L'univers interne des glaces me fait fondre, sa matière, sa nature richement bullebulée... qui dira la richesse que contient une goutte?
Mon but est donner le plus modestement possible un simple coup de pouce à ces existences et de les exposer.
Détail - cliquez pour voir la statue
Visite à l'atelier de l'artiste
Sous un hangard, le crayon aux lèvres, Philippe nous attend.
Nous étions prévenus : poussière, bruit... mais aussi rires, bonne humeur et sérieux mèlés, tout y est, tout est là.
Et l'artiste nous attend.
Artiste ou artisan? Artisan de l'art, certainement, qui construit patiemment, pierre à pierre, bloc de granit après bloc de granit son oeuvre bigoudène.
Et ses bigoudènes, figures on ne peut plus symboliques de la Bretagne, se dressent, parfois amusantes, quelquefois rondes, souvent bavardes, toujours droites et fières.
On comprend alors qu'ici se trouve la Bretagne, et que de ce granit dans lequel est construite l'âme bretonne émerge une reconnaissance sans cesse renouvelée de ses origines.
Recherche et affirmation. Par la force, car le granit ne se laisse pas manoeuvrer aisément, mais avec délicatesse aussi, car il en faut pour obtenir en fin du compte ces bigoudènes, parfois minuscules et finement ciselées.
D'autres, à l'inverse, s'érigent, lourdes et massives ou dressent fièrement leurs lignes épurées. Comme un pianiste alterne la caresse des touches à leur martèlement brutal, Il tranche ou cisèle, selon ses instincts, car
Philippe taille la pierre à l'instinct, bestialement, et laisse agir les impulsions d'un atavisme moderne.